On les a souvent réduites à des décors de cartes postales. Ses bords de mer, ses baigneurs, leur joie sans retenue, les drapeaux flottant au vent : Raoul Dufy (1877-1953) en a peint tant que l'on a pu croire qu'il n'avait jamais peint que cela.
« Raoul Dufy, le plaisir », c'est que le peintre n'a vécu que pour cela. Presque sans se soucier des autres, il a mené ses propres recherches. L'ordre à la fois chronologique et thématique de l'exposition laisse voir comment les fauves l'ont influencé, comment il a travaillé sur la lumière, sur les formes l'on devine le cubisme et comment il a choisi enfin le dessin et la couleur... Pour le plaisir. « Dans les années vingt, il y avait encore une pression forte de l'académisme. Il n'a rien inventé, sinon son truc à lui : la tache de peinture qui dépasse du dessin. Sa force, c'est d'avoir travaillé sur le décoratif et d'avoir réussi à toucher les gens. »
Chez Dufy, pas de naïades éthérées, mais des corps en mouvement, des voiles gonflées au vent des régates, et des arabesques aux balustrades, des oiseaux qui s'élancent, hors de toute perspective. Rien d'étonnant à ce qu'il ait ensuite travaillé pour l'édition de tissus, ni à ce qu'il ait peint, jusqu'à la fin, les cargos du Havre. Sur ses dernières toiles, ce ne sont que des silhouettes noires. « La forme qui reste sur la rétine après l'éblouissement du soleil. »